Publié le 22 novembre 2018 par Le castor masqué
Dans son ouvrage sur les Arbres remarquables de Lozère, Jean-Pierre Lafont nous raconte l’histoire étonnante de ce séquoia oublié sur un quai de gare et devenu 100 ans plus tard, un Géant parmi les géants. Quelle magnifique revanche sur la vie !
Son aventure lozérienne a débuté en 1908, lorsqu’il fut débarqué en compagnie de ses deux frères en gare de Banassac.
Une commande spéciale de M. De Nogaret qui souhaitait agrémenter le parc de son Château à St Laurent. Il était en effet de coutume d’installer dans les grands parc privés, des arbres de prestige rapportés des contrées lointaines. A cette époque, le cèdre était déjà passé de mode et les riches propriétaires ne juraient que par ces fameux arbres géants de la côte Pacifique comme nouveau « marqueur de statut social ».
Devenir une attraction exotique, voilà le destin que réservait M. De Nogaret à ces trois petits californiens. Un avenir finalement plutôt prestigieux et dont Papa et Maman, depuis leur forêt primitive, pourraient être fiers !
Mais la belle aventure des Américains en Lozère pris un tout autre chemin… Le châtelain oublia sa commande sur le quai de la Gare ! Quel malheur !
Un mauvais coup du sort, après un si long voyage les trois frères se retrouvaient abandonnés sur un quai de gare venteux de Margeride; cette fois leur avenir semblait bien sombre… Mais la vie est faite parfois de belles rencontres et c’est le Chef de Gare qui remarqua un curieux petit paquet soigneusement emballé. Intrigué par ces étranges « sapins exotiques », le brave homme eu pitié de ces pauvres naufragés. Il fallait leur trouver une nouvelle famille d’accueil. Il pensa immédiatement à Mme Gavène, dont le magnifique jardin de l’autre côté de la rue faisait l’admiration du village (et quelques jaloux…). Mme Gavène avait la main verte, tout le monde le savait, elle seule saurait prendre soin de ces petits réfugiés.
Elle les choya comme ses propres enfants, mais malgré tous ses efforts, seul le plus vaillant survécu – L’histoire reste vague sur les liens qui existaient entre le Chef de Gare et Mme Gavène et si finalement ces 3 petits plants offerts en cadeau n’étaient qu’un prétexte pour rendre visite régulièrement à la charmante voisine…
Quelques années plus tard, en 1914, un hôtel fut construit à l’emplacement même de la maison. Le jeune séquoia (dont tout le monde ignorait le nom), haut de ses 6 ans, fut épargné de justesse… Puis les années ont passé et le jeune arbre est devenu fort comme un chêne et aussi haut que les grands sapins de l’Aigoual. A l’étroit dans son minuscule jardin, il est devenu la fierté de la petite gare lozérienne. L’hôtel fut même rebaptisé du nom de son plus vieux pensionnaire : le Séquoia. Un pensionnaire majestueux, mais quelque peu envahissant et oppressant, il faut le reconnaitre, qui continue à grossir et à se rapprocher des murs inéluctablement…
Aujourd’hui, du haut de ses 110 ans (l’âge d’un gamin dans la famille des Séquoias
Un tour de taille de 9,64m à 1,30m du sol et 9,05m pris à la hauteur officielle d’1,50m.
Une croissance ultra rapide, puisque lors du relevé de l’inventaire en 2002, il ne mesurait que 8,32m de circonférence, soit un accroissement record de presque 8cm / an sur la circonférence. De toute évidence, la terre du jardin de Mme Gavène devait produire des légumes géants !
En revanche côté hauteur, le Colosse semble plafonner à 36m, la même hauteur relevée en 2002.
Le destin du Géant de Banassac est intimement lié au développement ferroviaire de la région. Une histoire qui n’est pas sans rappeler celle des séquoias plantés dans chacune des gares des Alpes du sud à la construction de la ligne Digne-les-Bains – Nice. Dans les années 1890, il était de tradition de planter un séquoia dans les gares du célèbre Train des Pignes avec comme double fonction : fournir un bel ombrage sur le quai en attendant l’arrivée du train (comment ça, les trains avaient déjà du retard à l’époque ?
Petit tour d’horizon des Séquoias géants remarquables en Languedoc-Roussillon.
Un tour d’horizon plutôt réduit… Le séquoia géant est un montagnard d’origine et non pas un méditerranéen, il ne supporte pas les longues périodes de sécheresse estivale et les atmosphères à faible taux d’humidité. Par conséquent, dans l’ancienne région Languedoc-Roussillon, seul le département de la Lozère est capable d’offrir de bonnes conditions de croissance au séquoia géant. Si l’espèce est présente exceptionnellement dans les autres départements, elle n’atteint jamais des dimensions « remarquables », à l’exception de quelques cas particuliers dans le piémont des Pyrénées-Orientales.
Son cousin, le sempervirens, est en revanche mieux adapté au climat méditerranéen.
Le Séquoia de Banassac est donc à ce jour, le plus gros séquoia recensé en Languedoc-Roussillon… mais il reste encore un peu maigre en comparaison au champion occitan dont il partage désormais la nouvelle région





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